Assistant entre autres de Jean Grémillon ou de Nicholas Ray, Édouard Luntz apprend le cinéma sur le tas. Il réalisera deux courts métrages avant de remporter le prix Jean Vigo avec "…Enfants des courants d’air ", la même année qu’ "À bout de souffle" de Godard. D’une facture comparable aux meilleurs films de la "rive gauche" de la Nouvelle Vague, près de la moitié de la dizaine de courts métrages de Luntz restent introuvables ou détenus par des ayants-droits peu conciliants. Qu’à cela ne tienne, les films présentés ici suffisent à prouver le talent d’un jeune réalisateur ancré dans son époque.
+ …Enfants des courants d’air
Édouard Luntz, 1959, 35mm, , 26'
À deux gares du centre-ville, derrière les usines, les tôles et les planches s’entassent. D’en haut, de côté et de l’intérieur, le réalisateur nous plonge dans un portrait fidèle de bidonvilles parisiens de la fin des années 50. Cœur du film, les jeux d’enfants s’épanouissent dans les terrains vagues rebondis propices aux glissades, aux cachettes et autres pneus bondissants. Impossible de passer à côté, "…Enfants des courants d’air" est d’une proximité confondante avec "Le chantier des gosses" de Jean Harlez. Plus court et parisien, mais un témoignage tout aussi touchant de l’enfance d’une époque révolue où, déjà, résonne le sifflet de la solitude des grandes villes.
+ Volcans endormis
Édouard Luntz, 1962, 35mm, , 19'
Crevasses larges et profondes ; brume épaisse noyant des arbres foudroyés. Serions-nous sur la lune ? Ou, soyons sérieux, en Chine ? Mais alors, d’où viennent ces volcans endormis ?
Ce qui démarre comme une commande touristique, propre mais banale, bascule vers un catalogue des étrangetés répertoriées dans les villes aquatiques d’Auvergne. Des lieux où les massés côtoient de très près les aiguiseurs de couteaux au coin de la rue de la Confiance. Un film facétieux qui remplit son cahier des charges touristique.
+ A Caccia
Édouard Luntz, 1962, 35mm, , 17'
Nous sommes en Corse, pays insulaire à la nature aride où les habitants vivent dans des villages bâtis sur des pentes escarpées, pour qui la chasse au sanglier sauvage est une libération. Édouard Luntz suit le rituel de la battue du sanglier du maquis Corse, une chasse en groupe qui se termine le soir venu autour de chants traditionnels. Un film devenu document précieux sur une pratique presque séculaire, toujours vivante, vecteur de cohésion sociale.
+ Bon pour le service
Edouard Luntz, 1962, 35mm > video, , 15'
Prélude aux "Cœurs verts", "Bon pour le service" explore le désarroi de jeunes appelés pour le service militaire. La France vit les dernières heures de la guerre d’Algérie ; eux, celles de leur adolescence, et ils doutent. Ces âmes mises à nu doutent de la pertinence du port d’armes dans l’épanouissement personnel, ils doutent du rêve de la vie de bureau et en retour, le Ministère de l’information doute de la pertinence de montrer ce film au public. Film poil à gratter de la bonne conscience national-productiviste, "Bon pour le service" fut longtemps censuré. Il marque les premiers pas du réalisateur dans son exploration de la fin de l’adolescence, notamment par la rencontre de deux jeunes tout juste sortis de prison, qu’on retrouve dans "Les Cœurs verts".
+ Bonus …