Après avoir réalisé "Cochons et cuirassés", violente satire contre l’occupation américaine, Imamura est mis à pied pendant deux ans par la Nikkatsu, sa maison de production. Qu’à cela ne tienne ! Le voilà reparti dans une enquête autour du monde paysan qui donnera trois ans plus tard "La Femme insecte" ou "Chroniques entomologiques du Japon". Étude implacable réalisée à partir de longs entretiens et de notes minutieuses, "La Femme insecte" retrace le parcours d’une petite paysanne, depuis sa relation ambiguë avec son père jusqu’à la ville et la prostitution. A la manière donc, des insectes mus par le seul instinct de survie et de conservation, la vie de Tome avance, coûte que coûte. Elle grimpe les seuls échelons qui se présentent : servante violée, ouvrière exploitée, bonne, prostituée, patronne de bordel. Sur fond de Japon en pleine modernisation, construit autour de moments clés et décisifs qui jalonnent la vie de Tome et qui laissent tomber dans les ellipses la ritournelle du quotidien, cette chronique implacable avance au fil de ses victoires et de ses revers, entre misère morale, rapports de dominations, exploitations des êtres sans cesse reconduits. Frontal, filmé dans un noir et blanc acerbe, "La Femme insecte" n’épargne rien ni personne, et ne se permet aucun atermoiement. Dans cette tourmente banalisée, il finit par devenir le portrait d’une femme que rien n’abat, loin des mélodrames servis par le cinéma japonais à cette époque et tout autre "Rue de la honte". C’est qu’il n’y a pas de honte chez Imamura. Il n’y a qu’un milieu, des conditions et des corps qui avancent. Brut, noir, implacable.
The insect woman au Nova
Dimanche 20 janvier 2019
Publiée le lundi 14 janvier 2019
3x2 places à vous offrir pour la projection de The Insect Woman le dimanche 20/1 à 18h30 au Cinéma Nova.
Participer : un mail avant jeudi midi à concours@radiopanik.org avec comme sujet "Imamura"
Shōhei Imamura, 1963, JP, 35mm > video, vo st fr, 123'
20.01 > 18:30